Association Présence de Gabriel Marcel

 
Un volume, 193 p.
ISBN : 2-7113-0478-­7
Nouvelle édition annotée
et préfacée
par Jeanne Parain-Vial
Éditions Universitaires, Paris 1991
Prix : 23 euros
(Épuisé).




ÊTRE ET AVOIR (1935)

Reproduisant les notes prises entre 1928 et 1933, le livre reprend d’abord la forme du Journal métaphysique. Et il nous permet de suivre, entre autres cheminements, le progrès de la réflexion qui a conduit à Position et approches concrètes du mystère ontologique. Dans les années trente, l’idéalisme de Brunschvicg et le bergsonisme conspirent à détourner la philosophie française de l’ontologie, que pratiquaient cependant les néo-thomistes. Or, converti au catholicisme en 1929, Gabriel Marcel ne se rallie pas pour autant à une scolastique dont l’objectivisme lui reste foncièrement étranger.

L’impact de la conversion n’en est pas moins réel. Au début du livre, quelques notes plus intimes disent l’expérience fulgurante de la grâce faite lors du baptême reçu le 23 mars 1929. Au terme d’un long détour, la « mystérieuse assurance », dont Gabriel Marcel avouera qu’elle lui a été donnée très tôt dans la musique, trouve son expression religieuse dans l’adhésion au christianisme. La recherche philosophique - que cette assurance avait toujours soutenue - prend dès lors une dimension nouvelle. Gabriel Marcel prend conscience de « l’identité cachée de la voie qui mène à la sainteté et du chemin qui conduit le métaphysicien à l’affirmation de l’être » (p.123).

Avant des Remarques sur l’irréligion contemporaine, des Réflexions sur la foi, et une étude sur La piété selon Peter Wust, le centre du livre est constitué par l’Esquisse d’une phénoménologie de l’avoir. Ce texte tire son importance notamment de la manière dont il croise le thème existentiel et le thème ontologique, qui constituent les deux grands pôles de la pensée de Gabriel Marcel. Découvrant que « les racines métaphysiques du pessimisme sont les mêmes que celle de l’indisponibilité » (p.106), celui-ci montre le principe de désespérance qui est contenu dans une vie - et une pensée - crispées sur l’avoir. Plus nous nous identifions à nos possessions, plus nous sommes en proie à une sorte d’esclavage incompréhensible et intolérable. Mais il ne s’agit pas, pour autant, de disqualifier de façon radicale, la catégorie de l’avoir, puisqu’elle renvoie aussi à la relation irréductible - et opaque - qui m’unit à mon corps. Prolongeant la critique du cogito cartésien, ce texte-charnière prépare la reconnaissance de l’être incarné comme repère central de la métaphysique.

Pierre Colin

Présence de Gabriel Marcel
Julien Farges - Archives Husserl de Paris
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